🔲 Le « vibe coding » révolutionne la BD et bouleverse le 9e art

Plus de crayons ni pinceaux, seulement vos mots pour façonner chaque case. Grâce au « vibe coding », l’ambiance devient votre crayon, et l’IA, votre atelier.

Illustration d’un homme créant des images de bande dessinée qui s’élèvent d’un ordinateur, symbolisant la création visuelle par intelligence artificielle grâce au vibe coding.

🔲 Le « vibe coding » révolutionne la BD et bouleverse le 9e art par Sylvie Gendreau, le laboratoire créatif des Cahiers de l’imaginaire — Création visuelle — Pierre Guité et Mid-Journey : Créer avec les mots : une scène futuriste où un auteur génère des images de bande dessinée à partir de son ordinateur, par la seule force de sa narration.

Fermez les yeux :

Vous êtes dans un atelier sans pinceaux ni gommes, chaque case naît de vos mots…

Il n’a jamais tenu un crayon de sa vie. Pourtant, Benjamin Arbeit signe Un Autre Monde, une BD de science-fiction de 50 pages entièrement générée par IA. Son arme secrète ? Le « vibe coding », cette méthode innovante qui transforme un simple prompt en planche illustrée.

Le vibe coding, c’est l’art de coder une ambiance plutôt qu’un trait, et d’investir la création visuelle d’une dimension sensorielle et narrative unique :

  • Prompt crafting
    Élaborer la galerie d’images mentales :
    « Un ciel crépusculaire strié d’ombres violines, comme une toile vivante baignée de silence. »

  • Direction artistique
    Affiner l’esthétique et l’atmosphère :
    « Chaque néon se reflète sur les pavés mouillés, injectant une douce mélancolie urbaine. »

  • Intuition narrative
    Insuffler une logique émotionnelle aux vignettes :
    « La colère sourde d’un protagoniste s’exprime en éclairs de lumière crue, sans qu’un mot ne soit prononcé. »

Quand l'ambiance remplace le crayon…

Le principe est simple : au lieu de maîtriser des techniques de dessin complexes, les créateurs décrivent leurs scènes à une intelligence artificielle. « Une rue poussiéreuse dans un Tokyo cyberpunk, éclairée par des néons violets, avec une pluie fine qui tombe sur l'asphalte. » Quelques secondes plus tard, l'image apparaît. Si elle ne convient pas parfaitement, on affine la description. On recommence. On explore.

Des chiffres qui donnent le vertige…

Les statistiques parlent d'elles-mêmes. Benjamin Arbeit a généré plus de 4,500 images pour n'en retenir que 250 dans son album Un Autre Monde. D’autres créateurs évoquent avoir produit 20,000 visuels pour leurs œuvres. Des volumes de production impensables avec des méthodes traditionnelles, où chaque planche peut exiger de nombreux jours de travail.

Ces milliers d’images ouvrent la voie à des processus créatifs où l’IA dessine en un éclair ce que l’esprit humain guide en amont.

Steve Coulson, pionnier du genre avec sa BD Summer Island, témoigne : « Ce qui m'aurait pris des années, je l'ai réalisé en quelques semaines », Son œuvre figure parmi les premières bandes dessinées entièrement illustrées par l’IA à avoir trouvé un public.

Au Japon, Rootport a créé un manga de 108 pages avec Midjourney, présenté comme le premier manga 100 % IA du pays (1).

L'écriture aussi se réinvente…

Le vibe coding ne se limite pas aux images. Les scénaristes découvrent dans ChatGPT un partenaire de brainstorming infatigable. « J'étais bloqué depuis des mois sur une séquence », raconte un auteur de comics. « En quelques heures de dialogue avec l’IA, j'ai obtenu assez de matière pour en faire l'une des meilleures parties de mon histoire. »

La création de Treasures Beyond Gold illustre parfaitement cette synergie. Son auteur, Stefano Cappellini, a d’abord collaboré avec ChatGPT-4 pour construire l'intrigue d'une chasse au trésor. (2) L’IA a proposé des personnages, structuré le récit, suggéré des dialogues. Une fois le script finalisé, Midjourney a pris le relais pour l'illustration. Un flux de travail hybride et efficace !

Les nouveaux outils des créateurs…

Sur Mac, l'écosystème créatif s'enrichit rapidement. Midjourney et DALL·E 3 fonctionnent directement dans le navigateur. Stable Diffusion propose des applications natives comme DiffusionBee. Pour l'écriture, Notion AI intègre l'assistance créative au cœur de l'outil de prise de notes. Le navigateur Arc incorpore un assistant capable de synthétiser des recherches en quelques secondes.

Mike Todasco pousse l'expérimentation plus loin. En 2025, il réalise un comics de 4 pages où ChatGPT génère simultanément texte et images, mise en page comprise. « Chaque case était parfaite, le lettrage impeccable. En feuilletant rapidement, on croirait une BD classique », s'enthousiasme-t-il. Le temps de création ? Vingt minutes au lieu de plusieurs semaines (3).

La controverse fait rage…

Le choc technologique fait aussi naître des résistances. Les réactions suite à la publication d’Un Autre Monde ont été explosives. « J’ai reçu des centaines de commentaires, dont beaucoup de dessinateurs furieux », reconnaît Benjamin Arbeit. L’accusation qui revient sans cesse : « l’IA tuerait le métier d'illustrateur. »

Les syndicats d'auteurs réclament de la transparence. Le SNAC en France milite pour un label identifiant clairement les œuvres créées avec l’IA. La question des données d'entraînement enflamme les débats : ces intelligences artificielles ont appris en analysant des milliers d'œuvres existantes. Est-il éthique d'utiliser commercialement leurs créations sans rémunérer les artistes originaux ?

Certains artistes traditionnels, comme George Vega, dessinateur pour Marvel et DC, ne veulent pas y croire :

« Je ne pense pas que ça soit près de produire une BD primée capable de toucher un public. Mais ce n’est qu’une question de temps avant que les gens voient ce qu’est vraiment l’IA et qu’ils commencent à la rejeter. »

C’est tout un enjeu juridique qui se joue : en 2023, les illustratrices Kelly McKernan et Karla Ortiz ont intenté une action collective contre Stability AI, Midjourney et DeviantArt, les accusant d’avoir utilisé leurs œuvres sans autorisation pour entraîner leurs modèles, portant atteinte à leurs droits et à leur revenu. À ce jour (mai 2025), aucun règlement financier au bénéfice de Kelly McKernan et Karla Ortiz n’a été annoncé publiquement :

  • La procĂ©dure est toujours en cours dans le district nord de Californie. En aoĂ»t 2024, le juge William Orrick a autorisĂ© la poursuite de leurs principaux chefs de violation de droits d’auteur, rejetant en partie les demandes de renvoi de l’affaire par Stability AI, Midjourney et DeviantArt.

  • Depuis cette ordonnance, le dossier est passĂ© en phase de dĂ©couverte, mais aucune annonce de règlement amiable ou de dĂ©cision attribuant des dommages et intĂ©rĂŞts n’a Ă©tĂ© rendue publique.

Ces recours judiciaires montrent que l’IA, en agrégeant des milliers d’images existantes, peut constituer une forme de plagiat numérique, posant la question d’un nouveau cadre légal : comment garantir une rémunération équitable des artistes quand leurs créations alimentent les algorithmes ?

Tant que ce mouvement de fond ne trouve pas de cadre légal rénové, chaque artiste hésitera à confier son univers à l’algorithme.

Entre fascination et défi…

Le vibe coding n’est pas encore parfait. Mike Todasco l'admet volontiers : si ses pages générées automatiquement sont visuellement cohérentes, l'histoire racontée part dans tous les sens. « Le héros change de nom et d’apparence d’une page à l’autre. L’intrigue devient incompréhensible. »

La cohérence narrative sur la durée reste le talon d’Achille de ces outils. Maintenir l’apparence d'un personnage identique sur 200 pages relève encore du défi. Mais Todasco reste optimiste : « Ces problèmes seront résolus dans quelques mois, pas quelques années. »

L’avenir du 9ᵉ art

Le vibe coding transforme déjà le paysage créatif. Des plateformes comme DashToon Studio promettent de convertir automatiquement un script en planches illustrées. Runway ML permet d’animer des cases pour créer des bandes-annonces. Les possibilités semblent infinies.

« C’est la session de brainstorming dont j’ai toujours rêvé », résume un créateur converti. L’IA ne juge pas, ne se fatigue pas, explore sans limite. Elle devient un partenaire créatif disponible 24h/24, capable de matérialiser instantanément les visions les plus folles.

Les auteurs pragmatiques y voient un outil supplémentaire dans leur palette. Ils expérimentent, repoussent les limites, créent des œuvres impossibles à réaliser seuls. Le vibe coding ne remplace pas l’artiste : il augmente ses capacités, ouvre de nouveaux territoires narratifs.

Comme le prophétise Mike Todasco : « Ce que nous voyons aujourd'hui est le niveau le plus basique que ces outils n’auront jamais. » La révolution ne fait que commencer. Les créateurs qui sauront apprivoiser ces nouvelles technologies écriront les prochains chapitres de l’histoire de la bande dessinée. Une histoire où l'imagination primera sur la technique, où les barrières à l’entrée s’effondrent, où chacun pourra raconter ses histoires en images.

Envie de tenter l’expérience ?

Découvrez l’exercice No. 208

Créez votre première case en vibe coding




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